Too Fast Too knight

2021, A.ROMY, Zürich, Allemagne.

Cur. Emmanuelle Luciani.

Artists : Bella Hunt & DDC.

Interview by Daniel Fuller.

FR / Considéreriez-vous Bella Hunt & DDC comme des "travailleurs de la mémoire" ?

Ce terme est génial. Définitivement, comme Nicolas Bourriaud l'a dit un jour, maintenant que Google Map a découvert le monde entier, le seul espace inexploré est l'histoire et dans ce sens, c'est un super matériau. L'histoire ne passe pas par le matériel, j'ai été formée par l'histoire de l'art. Comme Alois Riegl s'y intéressait, dans l'art populaire on peut comprendre l'histoire souterraine, précisément parce qu'elle est matérielle. Nous avons été formés en histoire de l'art par l'archéologie médiévale. Nous sommes fascinés par l'histoire des maçons, dans la grande histoire ou dans la petite. Les objets sont en quelque sorte moins définis et parlent à l'inconscient de chaque individu.

Comment définissez-vous un monument ?

Cette question est intéressante car le monument est vraiment une façon de communier. J'ai parlé tout à l'heure de Riegl, qui a écrit sur la valeur des monuments : valeur historique, valeur d'antiquité... De la même manière, nous pensons que la vocation d'un monument est celle d'un symbole qui parle à tous. Nous créons souvent nos œuvres comme des autels populaires pour communier et commémorer. Le monument est finalement quelque chose de très populaire. Le monument est comme la musique folklorique, on peut l'écouter ou la regarder de loin et l'apprécier, ou bien s'en approcher et la comprendre plus profondément.

Les monuments sont-ils censés être intemporels ?

Ce que nous aimons dans les monuments, c'est qu'ils puisent dans le temps et les époques. Ce qui nous intéresse, c'est de pouvoir parler à d'autres époques, et de pouvoir nous adresser à ceux qui seront là quand nous serons morts. Nous avons fait beaucoup d'autels pour les morts, pour le futur. Ce sujet du funéraire et de la transmission est central dans notre travail. C'est une façon de dialoguer avec l'histoire, dans notre processus de fabrication, nous essayons de faire des vestiges à la fois anciens, très anciens même, de l'histoire, et contemporains, à voir futuristes. Nous ne voulons pas être dans la rupture temporelle. Ce que nous faisons, ce sont des concrétions temporelles, où se retrouvent le passé, le présent et le futur.

Nous voulons toujours dialoguer avec l'espace, et au lieu de perturber l'histoire, nous préférons nous insérer à l'intérieur. Nous rendons toujours de petits hommages et nous nous considérons comme les maillons d'une chaîne. Nous produisons des choses pour ceux qui viennent après nous. Ce sont des installations globales, qui doivent évoquer un autre retour dans le temps, et qui sont toujours produites en fonction d'un contexte. Le fait que nous changions de formes, que nous ayons des géométries variables et que nous collaborions avec des artistes, c'est que nous voulons toujours du mouvement. " Le sens de la vie est de comprendre d'où l'on vient, quelle histoire, quelle famille, quelle ville, quel pays " comme le dit Dante Alighieri. Notre dialogue est viscéral et spontané, mais il s'incarne différemment selon les lieux et les envies.

Nous rendons hommage à toutes les cultures populaires et historiques et le temps est notre matériau. Nous allons nous promener dans l'art byzantin, l'art médiéval, et pourquoi pas dans le tuning. A Zurich, on s'est rendu compte qu'il y a beaucoup d'art gothique, dans une zone de friction. Nous voulions parler de la fusion des temps et des cultures. C'est pourquoi, pour cette exposition, nous nous sommes inspirés des armures de parade et des voitures tunées. Ce sont tous des objets de parade, pas vraiment fonctionnels. Nous créons des rencontres improbables.

EN / Would you consider Bella Hunt & DDC “memory workers?”

That term is great. Definitely, like Nicolas Bourriaud once said, now that Google Map has discovered the whole world, the only uncharted space is history and in that sense it’s a great material. History does not lie through material, I was trained by art history. As Alois Riegl was interested in, in folk art you can understand underground history, precisely because it is material. We were trained in art history by medieval archaeology. We are fascinated by the history of the masons, in the great history or in the small. Objects in a way are less definite and speak to the unconscious of each individuals.

How do you define a monument?

This question is interesting because the monument is really a way of communing. I spoke earlier of Riegl, who wrote about the value of monuments: historical value, value of antiquity... In the same way, we think that the vocation of a monument is that of a symbol that speaks to all. We often create our works as popular altars to commune and commemorate. The monument is finally something very folk. The monument is like folk music, you can listen to it or look at it from a distance and enjoy it, or get closer to it and understand it more deeply.

Are monuments meant to be timeless?

What we like about monuments is that they draw from across time and eras. What concerns us is to be able to speak to other eras, and to be able to address those who will be there when we are dead. We have made many altars for the dead, for the future. This subject of funerary and transmission is central to our work. It is a way of dialoguing with history, in our process of manufacture we try to make vestiges at the same time old, very old even, and contemporary, to see futuristic. We do not want to be in the temporal rupture. What we do are temporal concretions, where past, present and future are found.

We always want to dialogue with the space, and instead of disrupting the story, we prefer to insert ourselves inside. We always pay small tributes and we see ourselves as links in a chain. We produce things for those who come after us. These are global installations, which must evoke another return to time, and which are always produced according to a context. The fact that we change forms, that we have variable geometries and that we collaborate with artists, is that we always want movement. «The meaning of life is to understand where you come from, what history, what family, what city, what country» as Dante Alighieri says. Our dialogue is visceral and spontaneous, but it is embodied differently depending on the place and the desire.

We pay homage to all popular and historical culture and time is our material. We’re going to wander into Byzantine art, medieval art, and why not into tuning. In Zurich, we realized that there is a lot of gothic art, in a friction zone. We wanted to talk about the merging of time and cultures. That’s why for this exhibition we are inspired by parade armors and tuned cars. They are all parade objects, not really functional. We create improbable meetings.